vendredi 3 juillet 2015

Vulgarisation et BD

J'avais entendu parler de "L'Art préhistorique en bande dessinée" (notamment par l'auteur, Eric Le Brun, dont je suis "ami" sur FB). Deux tomes ont été publiés en 2012 et en 2013 par Glénat. Mais je n'avais pas lu. Le coût très modique de ces deux petits albums (5€ et 7,5€) m'a incité à les acheter dans la boutique de Lascaux 2. J'ai été surpris, je ne m'attendais pas à ce que j'ai vu/lu (les deux dimensions sont importantes dans la BD).

D'abord, il faut saluer le travail documentaire de l'auteur. Une bonne partie de ses dessins reproduisent de façon très évocatrice des oeuvres du Paléolithique supérieur. Art rupestre ou mobilier, il navigue habilement entre la fidélité aux originaux et l'unité de son propre style. Le choix du dessin au trait noir, seulement rehaussé par endroit par du rouge, dans le premier volume est à cet égard très heureux. Il y a un peu plus de couleur dans le second volume, mais elle reste assez discrète.

Le premier volume est consacré exclusivement à l'Aurignacien. Le second nous laisse à l'orée du Magdalénien (ce qui laisse penser que l'auteur a au moins une troisième époque en préparation). Et le moins que l'on puisse dire, c'est que rien n'est oublié. L'auteur ne se contente pas de nous présenter les principaux sites : il consacre aussi des cases, ne serait-ce qu'une, à des grottes moins connues. Il aborde aussi, brièvement, quelques pratiques culturelles qui ont laissé des traces archéologiques, telles que les sépultures ou les tentatives de tissage, ainsi que la musique.

Habilement aussi, l'auteur se contente de montrer les vestiges archéologiques. Il ne prend pas parti dans les querelles entre spécialistes quant aux motivations sous-jacentes à cet "art" préhistorique (cela dit, en le qualifiant d'art, il prend parti, c'est inévitable). Il ne fait pas non plus de concessions à la fiction, comme le terme de "bande dessinée" pouvait le laisser penser, esquissant à peine quelques mises en scène. Cela lui évite, là aussi, les controverses inutiles sur le réalisme de ses restitutions

J'ai été un peu dérouté par l'aspect "catalogue" de la fin du second volume. A force de tout montrer, l'auteur nous perd un peu dans la multiplication des sites. Mais c'est assumé : la partie entièrement documentaire qui clôt chacun des ouvrages, avec cartes, listes de sites et lexique en souligne l'aspect pédagogique. Nul doute que les plus jeunes y trouverons du grain à moudre. Je n'hésiterais en tous cas pas à offrir ces livres à des enfants dès la manifestation chez eux d'un signe d'intérêt pour la préhistoire : on ne sait jamais ce qui peut entretenir une passion, et il y a là tout à fait matière.

Pour conclure, un petit regret quand même : ces deux livres ne sont consacrés qu'à l'art préhistorique en Europe à partir de l'arrivée de l'homme moderne. Ils ignorent donc ce qui s'est passé dans les autres parties du monde, et dans les périodes plus anciennes. C'est particulièrement frappant dès le début du premier volume, quand l'auteur aborde, avec raison, la question des parures : dents et coquillages percés. N'oublions pas que de tels objets ont été fabriqués il y a au moins 75 000 ans en Afrique, à une date aussi éloigné des Aurignaciens que ceux-ci le sont de nous-mêmes. Il y aurait donc certainement un autre volume (intitulé "Epoque zéro"?) à dessiner.


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